Cartagène des Indes, Colombie!

A l’origine, il nous a fallu plusieurs mois pour décider de nous y arrêter, car les grandes villes ne nous intéressent pas vraiment.
Mais, tous les renseignements et conseils que nous avons pu prendre tous azimuts étaient unanimes: « C’est une escale formidable, il faut y aller! ».
Alors, allons y!!!! Voyons ça!!



C’est une grande ville (environ 1.2 Millions d‘habitants), chargée d’histoire, car elle fut fondée en 1533 par les Espagnols, peu de temps donc après la découverte du « nouveau continent » par Christophe et ses amis, apportant le salut du Christ chez les sauvages. La ville fût un très important port pour la flotte commerciale Espagnole, notamment concernant l’or, puis les esclaves. Elle fût maintes fois la proie des pirates et corsaires, par la mer et par la terre…c’est pourquoi ses fortifications sont encore bien impressionnantes aujourd‘hui.

Le premier élément de ces fortifications que nous allons voir en arrivant n’est pas des moindres au niveau originalité:
Pour s’approcher de la ville par la mer, il y a 2 points de passage, BocaGrande et BocaChica. Les Espagnols ont à l’époque construit un mur sous-marin de 2 km de long, pour fermer l’accès par BocaGrande, et obliger les navires à entrer dans la ville par BocaChica. Avec son chenal de 200 mètres de large maximum, le contrôle des accès était alors beaucoup plus simple.

Et ce mur de 2 km est toujours là! Il se trouve à 1 mètre sous l’eau, il est donc invisible! Une brèche y a été faite pour éviter aux petits bateaux de faire le grand détour par Boca Chica. Nous entrons donc dans la ville par cette brèche, en espérant que les bouées n’ont pas bougées à cause de la houle, ce qui nous ferait immanquablement rentrer dans ce mur. (le jour de notre arrivée, la bouée verte avait disparue….le jour de notre départ, elle avait été remise en place…).

Nous passons donc le fameux mur! Avec soulagement, nous passons dans cette petite brèche, ouf, bien visé!! Et dès cet instant la ville nous montre ce qu’elle a de plus frappant, son ambivalence, sa dualité à la fois vieille et moderne. Car en passant ce mur chargé d’histoire, nous sommes sous les grattes ciels immenses et modernes du quartier de BocaGrande. Autant de tours aussi hautes comprimées en un seul endroit, les pieds dans l’eau, on ne peut s’empêcher de penser à New York….Et elles ont l’air si récentes! Il y en a d’ailleurs encore pas mal en construction.

Le mouillage se situe dans un autre quartier un peu plus loin, on y retrouve, parmi les quelques 200 voiliers présents, Larès, Aquarius et Ti-Yann.
Jocelin, Stéphanie et Yannick vont nous aider à passer le premier cap de l’intégration en ville. Fini les baignades, fini le vent, bonjour pollutions diverses, poussières et chaleurs infernales, énormes portes containers, bateaux militaires, coast guard américains, paquebots gigantesques…
Dès 5 h du matin sur le quai tout proche résonne la musique du cours de gym qui a beaucoup de succès, les bateaux taxis passent et repassent à fond nous faisant rouler, les chiens aboient, le perroquet du bateau voisin crie à tue tête… tout le monde s’active.

Nous allons décider dès le premier jour de repartir le plus vite possible! Mais, il y a…..LA liste!!! Depuis le temps qu’on nous chantait que Cartagène regorgeait de bonnes affaires, de solutions à tous les problèmes et d’excellents professionnels, nous avons constitué une importante liste de choses à faire pour préparer la suite de notre aventure, parmi lesquels faire confectionner un grand taud de soleil récupérateur d’eau de pluie, acheter un alternateur, trouver des bruleurs pour la gazinière qui fait une grosse flamme jaune et qui noircit les casseroles, refaire les housses des coussins du carré, etc, etc, etc….

Nous allons donc immédiatement nous atteler à réduire la taille de cette liste. Le principe, c‘est que une fois les travaux commandés, nous aurons tout le temps de visiter la ville en attendant que ceux ci nous soient livrés.
Tout en vacant à ces occupations, nous allons quand même découvrir Cartagène! Tout d’abord le supermarché Carulla, tout près, on peut y manger, aller sur internet, découvrir de petites boutiques, y déposer son linge….Et, en allant, grâce à un très efficace réseau de taxis jaunes (1.60 Euro la course), de magasins en artisans, nous allons également aller de découvertes en découvertes et de surprises en surprises!

Et, malgré notre répulsion des grandes villes, nous allons rapidement, et tous les 2, commencer à beaucoup aimer celle-ci.
Il y a plusieurs raisons à cela, d’abord nous allons voir beaucoup de sourires et de disponibilité, partout où nous irons. Et ça, on adore!! Il faut aussi absolument signaler la beauté des filles de Cartagène, Pat en a plein les yeux!!!!!!!!
Ensuite, il y a cet équilibre incroyable entre le moderne et le vieux, entre le riche et le pauvre. On se sent en sécurité, on a envie de marcher, de flâner. Cette envie est accentuée quand on s’approche du centre ville, car la concentration de surprises et de découvertes est encore plus grande.

1ère surprise: Les prix! Nous sommes en Pesos Colombien. Pat va retirer 2.5 millions de pesos avec sa carte Visa! Enorme? Carrément! Il s’agit en fait d’environ 900 Euros! 10000 Pesos, c’est 3.5 Euros. Alors, nous avons maintenant sur nous, en plus de notre petit dictionnaire Franco-Espagnol, toujours notre calculatrice! Et là, incroyable, les prix sont si bas par rapport à ce qu’on connait, qu’il faut se retenir pour ne pas trop dépenser!!
Nous faisons fondre de nouveaux bruleurs de gazinière en bronze pour 3 Euros chacun! Nous achetons un matelas découpé pour notre carré à 40 Euros, achetons du tissus PVC 19 fois moins cher qu’en Martinique, et notre nouveau taud, dont nous sommes très content, nous le payons sûrement 3 ou 4 fois moins cher qu’ailleurs. Il fait 5 mètres de long en PVC bleu foncé et est conçu pour que nous puissions récupérer un maximum d’eau à la moindre averse.

2ème surprise, l’alimentation! C’est super bon, et pas cher! Et les fruits sont incroyables, les meilleurs que nous connaissons! Nous mangeons plusieurs fois dans un restau très sympa avec un jardin aménagé pour les enfants, où nous dégustons de bonnes pizzas mais surtout d’excellentes brochettes de bœuf, délicieusement tendres! Et le nec plus ultra: le vrai jus de mandarine glacé qui fait le bonheur du capitaine!
En ville, où que l’on soit, des marchands ambulants nous proposent des grands gobelets pleins de fruits préparés (2000 pesos/60 centimes) : pastèques, mangues, noix de coco, et jus de fruits frais. On peut grignoter de très bonnes chips de bananes, ou se désaltérer d’une eau de coco bien fraiche avant de déguster la chair tendre du fruit qu’un coup de machette a fait apparaître (1000 pesos!). Les beignets salés se vendent à tous les coins de rue ainsi que pleins d’autres ’’coupe faim’’ …Nous gouttons pas mal de choses!! Pat enchaine les gobelets de pastèque, Isa les coco fraiches!


3ème surprise, l’artisanat et l’incroyable centre ville! L‘influence architecturale espagnole y est très marquée. Comme nous sommes en décembre, de magnifiques décorations nous sont proposées, le centre ville est superbe! Les lumières de Noël sont partout. Il y a beaucoup de touristes, et la sécurité est très bonne, car la ville met le paquet pour plaire (Il parait que pas moins de 10 paquebots par semaine viennent faire escale à Cartagène!!!!). Il y a de très belles demeures aux balcons fleuris, tout en bois et pleins de musées, pleins de terrasses de bars et restaurants animées et sillonnées par des vendeurs de cigarettes ou cigares.
Mais le centre c’est aussi une fourmilière: tous les métiers de l’artisanat y sont représentés: fondeur, cordonniers, rempailleurs, bijoutiers, vitriers, électricien, électrotechnicien, mécanicien, …car ici TOUT se répare!!!! TOUT! Certains sont assis devant une table sur le trottoir avec des dizaines de téléphones portables démontés en train de faire quelques microsoudures pour les réparer….ou aussi des montres, des écrans plats, des imprimantes, etc…Magasins de luxe, confections, bijoux, pierres précieuses, or fin, émeraudes…Plus loin on achète son DVD gravé avec le film de son choix pour 60 centimes (ont-ils payés les droits copyright ces petits filous???) ….On peut téléphoner grâce à une « cabine vivante » qui a plein de téléphones portables et vous fait le meilleur tarif à la minute, on trouve des magnifiques tissus colorés, du matériel de bricolage, du formica, du carrelage, des peintures, des selles pour les chevaux, des roulements à billes et, en s‘écartant un peu du centre ville…des boites de vitesses et embrayages carrément démontés en pièce détachés, etc……impossible de décrire tout ce qu’on peut voir, c‘est fou!!!
En Occident, les grands groupes industriels ont réussi à rendre la plupart des produits jetables (c’est plus intéressant financièrement de changer de voiture que de changer un embrayage). A Cartagène, attention, on ne change ni la voiture ni l’embrayage, on le répare!!
Il y a de vrais professionnels, spécialistes dans chaque métier. Ils nous ont impressionnés par leur compétence, leur savoir-faire, leur sens du commerce et du service….Un mécanicien qui nous a rendu service a même refusé notre argent, en disant que ça lui avait fait plaisir de nous aider!!
Si un fondeur n’avait pas pu nous fondre de nouveau bruleurs en bronze (3 Euros chacun), nous aurions dû changer de gazinière…car la société Electrolux ne pouvait pas nous en fournir….En voyant ça on comprend le gaspillage généré par notre société de consommation.

4ème surprise: Croyez vous être au bout de vos surprises? Et bien allez donc faire un tour au marché Bazurto!!! C’est vraiment dur de trouver les mots! C’est un immense marché, très très sale et pollué où les touristes ne s’aventurent pas en général.
En arrivant, l’odeur est presque insoutenable, la rivière qui borde le marché est noire et couvertes de déchets immondes, un grillage empêche d’y tomber, les pélicans y cherchent à manger. Le poisson est disposé sur des tables en plein soleil et couverts de mouches, il faut passer par là pour entrer dans le labyrinthe….Une fois à l’intérieur, des centaines d’étales proposent de tout. Nous achetons des fruits (12 grosses oranges 60 centimes!), des légumes, un hamac, un barbeccue en fonte d’alu, des chaussures…Nous passons près d’une souche où les poules sont décapitées et la viande découpée (les restes s’entassent au pied de la souche), près d’un énorme camion plein de bananes, un homme pousse une charrette avec des roue métalliques presque carrées avec quelques milliers d’œufs dedans, les chiens pleins de puces ont la gueule dans les poubelles, ….ETC….
C’est Bazurto, c’est indescriptible il faut le voir pour le croire.
MAIS….plus surprenant encore, à moins de 200 mètres du marché, quelques marches vous emmènent………….à Carrefour!
Alors là on est saisie par la climatisation, une galerie commerçante comme à Paris, les boutiques des grandes marques, les voitures japonaises exposées à gagner sur un carrelage immaculé, les escaliers roulants, et l’entrée d’un grand magasin de bricolage plus grand que Castorama et Leroy Merlin à La Rochelle. Tout est beau, tout est propre, tout sent bon, tout brille…..On peut ici acheter sa paire de basket made in China 20 fois plus cher que 200 mètres à coté! C’est super classe hein!? Vive les marques!!!
Mais, à Carrefour nous trouvons de la moutarde Maille bien de chez nous….alors nous y ferons aussi nos courses!! Comme tous les occidentaux que nous sommes!


Cartagène, c’est un spectacle permanent!!!!!

Il semble que notre blog, à la base pensé pour nos familles et amis, avec qui nous voulions partager nos aventures, soit maintenant lu aussi par des marins qui sont derrière nous, sur la même route (ce qui semble logique vu que nous lisons les blogs de ceux qui sont devant nous). Nous avons en effet rencontré Valérie et Marc à bord de B&B, qui sont venus nous dire que notre blog leur avait été bien utile….
Alors, nous allons peut être mettre un peu plus de détails concernant la navigation, l’escale, les prix, etc…pour d’autres questions, écrivez nous….
Un mot donc concernant le point noir de cette escale: Le mouillage et le « club nautique ». C’est une catastrophe, pour l‘instant. On nous avait de plus prévenu que l’escale de Carthagène était chère, mais nous ne savions pas pourquoi. En fait il y a, normalement 3 choses à payer:

- Les formalités d’entrée-sortie du pays: il faut passer par des agents qui « s’occupent de tout » (David et Manfred ne sont jamais bien loin). Parait que c’est obligatoire…….Mais est-ce que c’est vrai?? En tout cas ils font payer 90 dollars pour ce service, qui en vérité ne coute presque rien auprès des autorités, les différents intermédiaires s’en mettent tout simplement plein les poches (et fournissent la facture à la fin!).
Grace à de bons conseils, nous avons pu nous passer d’eux en allant dans un bureau situé au centre commercial Getsemani. Cela nous a permis de ne payer « que » 60 dollars. Dans ce bureau, nous avons croisé David, qui en fait, ne fait que leur amener les papiers.
Nous ne sommes pas d’accord avec ces pratiques malhonnêtes, mais tout le monde s’y conforme presque sans discuter.

- En 2, une nouvelle taxe apparait vers le mois d‘Octobre, quelques semaines avant notre arrivée. Elle émane du « Capitaine du Port ». Apparemment, celui qui gère donc tout ce qui se passe dans cette immense baie où se côtoient les gigantesques portes-containers, les non moins gigantesques paquebots, les navires des armées colombiennes et étatsuniennes, les taxi-boats roulants à toute vitesse, et les plaisanciers de passage.
Il a décidé, ce fameux Capitaine, que tout bateau restant plus de 10 jours paierait 70 dollars. Pourquoi? On ne sait pas, c’est comme ça. Sûrement pour avoir le droit de salir incroyablement sa coque dans ses eaux immondes et de se faire rouler toute la journée par les taxi-boats.
Pour éviter de payer, nous faisons notre entrée 5 jours après notre arrivée et restons 3 jours après avoir fait la sortie. C’est désagréable de se sentir en faute, mais nous ne voyons pas pourquoi nous devrions payer ça.
Si c’est pour éviter les squatteurs il pourrait au moins donner un mois de délai quand même.

- Et en 3, le club nautique, qui réclame 20 dollars par semaine pour l’utilisation de ses services. Alors là c’est la cerise, ou le pompon comme on veut. Le club nautique était construit sur l’espace public. La ville l’a fait démolir pour construire une piste cyclable….On voit encore le mur carrelé des douches qui donne sur cette piste cyclable!
En tout cas, il faut traverser le chantier pour accéder à la rue. Les quais et les eaux sont dangereux pour les annexes et les hommes et il faut escalader pour descendre.
A part un tuyau qui permet, quand ça fonctionne, de remplir ses bidons d’eau, et le fait qu’il s’agit du point de rendez vous pour les remplisseurs de bouteilles de gaz, pas grand-chose à dire de positif. Ils donnent tout de même des photocopies d’un petit guide bien pratique pour trouver les professionnels qui nous intéressent. Mais bon….
Espérons que les travaux vont avancer, nous avons cru comprendre que le conflit avec la ville n’était pas terminé….
Nous avons donc évité le club nautique, et n’avons rien payé non plus, car rien ne le justifiait.


En conclusion, nous avons énormément apprécié notre escale de Cartagène, nous regrettons de n’avoir pas pu rester 1 semaine de plus (à cause de cette taxe), et nous espérons qu’un jour une marina digne de ce nom, avec des places, des services et des tarifs normaux verra le jour.
Plus tard, à Rosario, nous étions heureux de nous baigner et de pouvoir nettoyer Fidji dans une eau redevenue bleue. Il était couvert d’une couche de pollution noire (on imagine les poumons des gens des villes), et sous la ligne de flottaison….il y avait du boulot!
La mer, à la fois décharge et source d’alimentation, sera bientôt toxique à Cartagène, si elle ne l’est pas déjà, pourtant certains s’y baignent, summum de l’inconscience.
Bon, ceci n’est pas un blog politique……mais……VOTEZ VERT!!!!!!!

Hasta Luego!
Pat et Isa