De Aruba vers Carthagene, nos premiers pas en Amerique du sud partie 1!!

Lundi 9 novembre…
après une nuit au mouillage de l’aéroport d’Aruba, nous levons l’ancre à 7h et, très vite à la voile, nous voguons vers Montjes, (rappel d’Espagnol le « j » se prononce comme celui de Julio dans Julio Iglesias).

Il s’agit de quelques minuscules iles-cailloux sans une once de verdure sur lesquels le Venezuela a son poste militaire de gardes-côtes le plus à l’Ouest du pays. Ceux-ci accueillent volontiers les voiliers de passages pour une ou quelques nuits.
C’est à nouveau une journée de rêve pour naviguer et retrouver les bleus incroyables du ciel et de la mer. Et les dauphins qui viennent danser autour de Fidji!!!!!
En route nous pêchons une dorade qui en plus de notre repas de midi nous permettra de remplir 3 bocaux!

En nous voyant approcher sur leur radar, les gardes-côtes de Montjes entrent en contact radio avec nous. Toujours quelques difficultés en Espagnol, mais ils nous attendent, pas de problème, nous sommes les bienvenus!
L’abris est original, deux rochers ont été reliés entre eux par une grosse digue de 50 mètres de long environ. Un quai a été construit pour pouvoir débarquer, et un gros cordage a été tendu entre les 2 iles pour permettre aux bateaux de s’y accrocher.
A notre arrivée nous sommes accueillis par des bravos et des hourras venus du haut de la falaise. Ils émanent des équipages des 2 autres voiliers présents à Montjes ce soir là, qui ont contemplé de la haut la belle arrivée de Fidji, voiles en ciseaux dans le soleil couchant.
Dès que nous sommes accrochés, les autorités se présentent en demandant au captain de venir à terre.
Le « commandant de l’île » se présente. Il doit avoir 25 ans!!! Ils sont une soixantaine de militaires, en poste 45 jours avant la pause de 2 semaines. Ils ont un gros groupe électrogène et donc tout le confort, même la clim et la Playstation, dortoir, cantine, etc... L’âge moyen doit à peine dépasser 20 ans, et Pat retrouve ici comme une ambiance d’internat. On remplit les papiers, aucun souci, suffit de répondre aux questions, merci le dictionnaire Franco-Espagnol!

De retour sur Fidji, nos voisins de cordée, ainsi que les 2 bateaux de pêche sur le quai, sont déjà couchés. Nous nous couchons également bien tôt, demain déjà, nous repartons pour la Colombie, mais avons bien l’intention de monter jusqu’au phare avant de partir. On entendra malheureusement le groupe électrogène cracher ses décibels toute la nuit.
Au petit jour, alors que les autres bateaux sont déjà partis, nous voilà marchant sur le sentier pierreux de l’ile. Un dessin formé de pierres blanches nous souhaite la bienvenue et représente en son milieu une ancre. Nous grimpons vers le phare. José, l’un des gardes côtes nous rejoint pour nous accompagner, avec un chien attachant. Il nous raconte un peu sa vie ici.
Arrivé au sommet, son collègue, en veille radar et radio, nous ouvre gentiment les portes du phare, et nous sommes alors au point culminant de l’île. De là nous voyons nettement les côtes montagneuses de la Colombie où la nuit dernière encore éclataient de nombreux orages…gloups….

Puis nous regagnons Fidji, seul accroché sur son gros cordage, car il est déjà plus tard que prévu pour partir, 8h30.
Nous partons, et là, incroyable, les gardes-côtes, qui dispose d’un sifflet de ralliement, nous sifflent un superbe et très sympathique au-revoir.
C’était une brève, mais bien agréable rencontre, sur un caillou des plus austères…..

Nous naviguons donc vers la Colombie. Qu’allons nous y trouver, les préjugés sont nombreux, on croit savoir des choses sur ce pays, mais on ne sait rien vraiment, car quelles sources d’informations faut il écouter? Allons nous finir dans une forêt, séquestrés par des révolutionnaires ou égorgés par des trafiquants de Cocaïne? Ou bien chavirer sous les assauts de la mer déchainée qu’on nous y a décrite? L’esprit du capitaine vagabonde, Isabelle est bien plus sereine, elle a rencontré tant de colombiens adorables …
En tous cas Fidji file, toujours à la voile. La mer change de couleur et passe au vert à l’approche de la côte.

Nous approchons d’un véritable désert, torride sous un soleil très puissant, sur fond de hautes montagnes frôlant ou parfois dépassant les 5000 mètres!
Nous longeons la péninsule de Guarija, passons la Punta Galinas, à 500 mètres de la côte environ. Le vent, bien que fort, (25 nœuds) n’est pas déchainé, et la mer, agitée, non plus, ouf.
Le sable orangé donne une lumière particulière au paysage. C’est un décor où tout semble endormi. Quelques oiseaux nous rappellent que même dans les endroits les plus secs, la vie est présente. Nous allons passer une nuit seul dans une gigantesque baie, « Bahia Honda ». Nous y verrons une petite barque de pêcheurs, mais ils ne s’approchent pas. Cette baie n’est pas cartographiée, nous resterons donc proche de la sortie et sommes un peu secoués par la houle, mais rien de grave. Pat observera anxieusement les orages qui sévissent sur les sommets désormais tout proches, dans une nuit sans lune…
Le lendemain, nous apercevons un groupe de voiliers au loin, sûrement des Américains, ils préfèrent naviguer en flotte. Il y a du vent mais ils sont au moteur, nous les doublerons à la voile, sans forcer….étrange….Et ils s’appellent toutes les 5 minutes à la radio pour demander si tout va bien…

Nous passons de très près le Cabo de la Vela, lui aussi redouté, dans un temps idéal pour la voile, la terre rouge, le ciel bleu, la mer verte, c’est magnifique. Nous jetons l’ancre juste derrière, et sommes cette fois avec une dizaine d’autres voiliers.
Les locaux traversent la baie sur leurs barques. Ils sont très souriants ce qui nous encourage à croire qu’ils sont contents de la présence de tous ces nomades de la mer….
Nous avons envie de descendre à terre, Pat a envie de sortir sa planche, mais nous allons à ce moment vivre une expérience météo spectaculaire. À l’horizon tout proche se succèdent les grains orageux. Jusque là ça va, et Isabelle se dit qu’on est certainement plus à l’abri ici qu’un peu plus à droite. Pat avait bien vu ce gros nuage noir, mais bon il est derrière, alors….Mais le ciel se met à changer presque d’un seul coup. Et nous qui avons l’habitude de voir les grains arriver par devant, dans le sens du vent, nous allons avoir la surprise d’en avoir un qui remonte le vent et arrive par derrière!!!
Et d’un seul mouvement, tous les bateaux se retrouvent tournés vers l‘Ouest! Sous un ciel épais dont les nuages sont si proches de nos têtes qu’Abraracourcix se serait caché sous terre. Le vent forcit, le mur de pluie est proche, on le distingue nettement. Branlebas de combat, tout le monde sur le pont, nous sommes dorénavant trop près de la plage et risquons de nous échouer, nous levons l’ancre à toute vitesse pour nous écarter.
Les nuages semblent peints d’une peinture très épaisse et leur relief est impressionnant.
Nous n’avons pas fini de relever l’ancre quand notre annexe, que nous avions détaché pour aller à terre, s’envole purement et simplement du pont de Fidji, atterrit un peu plus loin et file vers la plage….un américain fonce nous la récupérer, sympa!!! Et des trombes d’eau s’abattent sur nous, ça faisait longtemps!! Tant mieux, on en récupère le maximum! Et tout est bien qui finit bien!

C’est un peu plus loin, devant le village, que nous allons passer une nuit de tout repos, dans un calme Olympien! Au réveil, pas une ride sur la mer, pas un souffle de vent, un ciel dégagé, nous retrouvons le spectacle du jour naissant. Le soleil, sur le point de se lever, en attendant de nous éblouir, s’amuse comme si souvent à libérer ses rayons doucement, les uns après les autres et comme sa palette de couleur est toujours aussi variée, le ciel et le paysage alentour se colorent de toutes les variétés de roses, d’orangers, puis tout devient de plus en plus lumineux. Les oiseaux s’ébrouent avant leur premier envol, les poissons sautent, et dans le village tout près les hommes et les femmes sortent de leur hamac et vont tranquillement se baigner. Les plus courageux sont déjà dans leur barques et relèvent les filets profitant à leur tour du spectacle magnifique d’un lever de soleil.
Tout est paisible…
On est déjà séduit par la Colombie! On recule nos horloges, cool, on gagne une heure sur la journée!
Nous avons 120 miles (220 km) à parcourir….Que faire sans le vent? Les américains partent, nous attendons.
Et vers midi, il se lève, tranquille la grasse matinée!
Nous aurons alors la chance d’effectuer une des plus agréables navigation depuis le départ. Mer plate, 15 Nœuds de vent de Nord, nous sommes au près bon plein (à 60 degré du vent) avec une légère gite. Fidji ne vogue plus, encore mieux, il glisse, sans bruit, à 6 Nœuds, le pied.
Nous ferons 9 heures de voile inoubliables, puis, première partie de soirée, le vent tombe, la nuit noire, et la vision angoissante de ces orages.
Mais nous avons notre cher Morphéus, et grâce à lui nous réussirons à voir et à éviter les 2 gros orages qui nous barraient la route cette nuit là. Lors des longues navigations, Pat préfère carrément faire demi-tour ou stopper le bateau que de passer dans un gros nuage noir électrique ou non. Ce n’est pas pour les 15 ou 30 minutes perdues qu’on va foncer dedans. Les Américains juste devant nous sont passés en plein dedans et ils n’ont pas aimé, d’après ce que nous avons entendu à la radio…

A 4h, toujours dans l’obscurité la plus totale, alors que nous naviguons doucement au moteur, nous entendons un POC bizarre sur la coque et un autre encore plus bizarre dans l’hélice. On stoppe tout, Pat se penche pour regarder la mer avec une lampe et là….horreur……nous ne sommes plus en mer, mais en forêt.
A cette heure de la nuit le cerveau ne fonctionne pas toujours à fond, alors les pensées s’entrechoquent dans une telle situation.
Pas la peine de poster quelqu’un à l’avant pour éviter les branchages, nous sommes en plein dedans, il y en a partout. Peur pour l’hélice, peur pour l’aspiration d’eau du moteur, peur pour le speedo et le sondeur…nous repartons à 90° de notre route pour essayer de sortir de là, au ralentit de chez ralentit….et nous réussissons. Nous étions pourtant à ce moment à 40 km de la côte…

Et un nouveau jour se lève! Surprise, le paysage n’est plus du tout le même!!
Des falaises et montagnes couvertes de végétation tropicale luxuriante à perte de vue, des sommets très hauts et hérissés (plusieurs sommets à 5700 mètres avec neige éternelle!!), une eau translucide. Nous sommes en vue des « cinq baies » .

La suite dans la 2eme partie!